Télé50 avec la radio Canada
Donald Trump a été banni de Facebook, mais le conseil de surveillance du réseau social doit décider si l’ex-président américain pourra y revenir ou non. De nombreuses associations et experts appellent l’entreprise à ne pas permettre le retour du milliardaire républicain, qui fait actuellement face à un procès en destitution.
Le conseil de surveillance indépendant du groupe, Facebook Oversight Board, qui doit rendre son avis d’ici la mi-avril, a reçu plus de 9000 lettres et commentaires du public à ce sujet.
Ses membres peuvent approuver le blocage du compte pour une durée indéterminée, ou imposer à Facebook de laisser revenir l’ancien chef d’État, évincé du réseau après les émeutes du 6 janvier au Capitole.
Notre message est simple : annuler le bannissement de Trump serait une invitation à la violence, à la haine et à la désinformation qui coûteront des vies et saperont la démocratie, a écrit dans une lettre une association anti-Facebook, qui se fait ironiquement appeler le véritable conseil de surveillance de Facebook (Real Facebook Oversight Board).
Certains peuvent dire que c’est une question de liberté d’expression. Ils ont tort, poursuit la missive.
Donald Trump peut faire des entrevues. Il peut aller sur Fox News. Il peut rédiger des articles d’opinion ou envoyer des courriels, est-il écrit. Personne n’a le « droit » inhérent d’utiliser une plateforme de réseaux sociaux pour répandre la désinformation et inciter à la haine encore et encore, ou faire amplifier son message par des algorithmes.
« Incitation à l’insurrection »
L’ex-locataire de la Maison-Blanche est accusé au Sénat d’incitation à l’insurrection dans l’assaut du Capitole du 6 janvier dernier.
Les élus lui reprochent ses allégations répétées de fraude électorale, sans fondement, et ses propos ayant encouragé des centaines de ses partisans à s’engouffrer violemment dans le siège du Parlement américain. Cette attaque a choqué tant dans le pays qu’à l’étranger.
Retirer un dirigeant politique des plateformes devrait être le dernier recours, étant donné les bénéfices [pour la démocratie] d’un débat politique robuste et d’une protection des discours liés aux élections. Mais les actions de Trump justifient de le bannir indéfiniment, a écrit un groupe de professeurs de droit et de philosophie de différentes universités californiennes.
Si les plateformes avaient accordé à Trump un accès continu à de larges audiences, il aurait provoqué des violences supplémentaires et sapé encore plus la transition du pouvoir, ajoutent les signataires, dont Alex Stamos, de la prestigieuse Université de Stanford, ancien responsable de la sécurité à Facebook.
Une photo d’une publication du compte Twitter de Donald Trump.
Twitter ne laissera pas revenir Donald Trump sur la plateforme même s’il devait être de nouveau candidat à la Maison-Blanche. Photo : Getty Images/Justin Sullivan
Pas de retour
Twitter, qui avait aussi décidé de bannir Donald Trump de sa plateforme pour incitations répétées à la violence, ne le laissera pas revenir même s’il devait être de nouveau candidat à la Maison-Blanche.
Selon nos règles, quand vous êtes évincé de la plateforme, vous êtes évincé de la plateforme, que vous soyez un commentateur, un directeur financier, ou un ancien ou actuel responsable politique, a justifié le directeur financier de Twitter, Ned Segal, sur la chaîne CNBC mercredi.
Jack Dorsey, fondateur et patron du réseau des gazouillis, avait néanmoins senti le besoin de détailler sa position à la mi-janvier.
Il avait expliqué que c’était la bonne mesure à prendre, mais qu’elle constituait néanmoins un échec à promouvoir une conversation saine et qu’elle établissait un dangereux précédent par rapport au pouvoir détenu par les grandes entreprises.
Donald Trump était suivi par quelque 88 millions de personnes sur Twitter, son principal mégaphone.
Son ostracisme a été largement salué, mais il a aussi suscité des critiques d’associations et de dirigeants – notamment de la part de la chancelière allemande Angela Merkel –, inquiets du pouvoir des sociétés technologiques sur la liberté d’expression.
Le conseil de surveillance de Facebook a vu le jour récemment, à l’initiative du groupe californien, soucieux de gagner en crédibilité quant au problème de la modération, après de nombreux scandales.
Ses membres indépendants, des personnalités de la société civile, sont chargés d’évaluer des mesures de la plateforme portant sur certains contenus jugés problématiques et de rendre des avis contraignants.
Fin janvier, il a tranché ses premiers contentieux, sur des sujets allant de seins nus montrés pour une campagne contre le cancer aux tensions politiques qui ont cours au Myanmar.
Sa décision sur Donald Trump est évidemment très attendue, comme en témoigne le flot d’opinions reçues jusqu’à vendredi, la date limite pour le public souhaitant donner son avis.
De nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) y ont vu une occasion de rappeler le rôle joué, selon elles, par les réseaux sociaux, où des mouvements violents ont pu s’organiser depuis des années, propager de fausses rumeurs et rallier de nombreux utilisateurs.
Facebook a permis des mois de mensonges de Trump sur les élections, parce qu’il apportait de l’attention des utilisateurs et des profits à sa plateforme, a déclaré Jim Steyer, président de l’association Common Sense Media.
En le laissant faire, argumente-t-il, Facebook a quasiment cassé notre démocratie.